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Le blog de M.Hermassi

Somalie : "Il faudrait des ponts aériens vers d'autres zones"

29 Juillet 2011 , Rédigé par M.Hermassi Publié dans #Politique

 

Un premier avion du PAM en provenance de Nairobi a débarqué mercredi à Mogadiscio 10 tonnes de suppléments nutritionnels pour les enfants souffrant de malnutrition.

 

Stéphane Doyon est responsable nutrition de Médecins sans frontières, l'une des rares ONG à avoir accès aux victimes de la famine en Somalie. Se réclamant d'Al-Qaida, les shebab tiennent en effet la presque totalité du centre-sud de la Somalie, où plusieurs organisations humanitaires, dont le Programme alimentaire mondial (PAM) de l'ONU, sont persona non grata depuis fin 2009 et ne seront pas autorisées à revenir malgré la crise, ont prévenu les islamistes. Il explique comment les ONG s'efforcent d'agir dans ce pays en guerre civile.

L'ONU a ouvert depuis mercredi 27 juillet un pont aérien en direction de Mogadiscio, la capitale somalienne, en soutien au gouvernement de transition somalien. Quel effet a cette aide pour les victimes de la sécheresse ?

Le pont aérien amènera une aide nécessaire à Mogadiscio, mais il aidera uniquement les habitants de la capitale. Ces denrées ne peuvent pas pour l'heureêtre transportées dans des zones où la guerre civile rend l'accès plus difficile, où la situation humanitaire est plus alarmante. Il faudrait des ponts aériens vers d'autres zones.

Jeudi 28 juillet, la force africaine, qui est déployée depuis 2007 dans Mogadiscio, s'est emparée de plusieurs nouvelles positions shebab à Mogadiscio. Comment ces combats affectent-ils l'aide à la capitale ?

Il y a un afflux récent de déplacés à Mogadiscio [environ 100 000 personnes ces derniers mois, selon le Haut Commissariat aux réfugiés]. La ville était relativement accessible pour les humanitaires et plus calme dernièrement. Nous sommes soucieux face à toute hausse de la violence qui pourrait bloquer notre capacité àsecourir des personnes qui en ont besoin.

Comment pouvez-vous acheminer de l'aide dans les régions du Sud, tenues par les insurgés ?

Nous travaillons de façon totalement indépendante, pour démontrer notre neutralité, notre impartialité. Nous avons pu garder un accès à de nombreuses zones du pays. Nous ne voulons pas risquer d'être victimes d'une déclaration des Nations unies ou de bailleurs mal interprétée. Donc nous assumons toute la logistique, l'achat, la livraison de notre aide nous-mêmes.

Par ailleurs, nous travaillons avec des équipes locales. Une antenne de MSF prend en charge les structures médicales, la logistique, l'administration de nos différents programmes à distance, depuis le Kenya. C'est un système de "remote control", de contrôle à distance et c'est probablement en Somalie que ce type d'intervention a été testé le plus longtemps par MSF.

Pouvez-vous éviter le détournement de l'aide humanitaire ?

Nous rencontrons régulièrement le personnel local à Nairobi, à Mogadiscio. Nous sommes en contact constant par téléphone. Ils nous envoient également des compte rendus photos et vidéo. Nos procédures permettent d'évaluer les programmes, de comparer par exemple le nombre d'enfants pris en charge et l'utilisation des stocks de nourriture et des protocoles d'aide. Mais il n'est pas possible d'éviter totalement un détournement de l'aide.

Est-ce un système viable dans une situation d'urgence ?

Le nombre de personnes que nous voyons affluer de Somalie vers les camps de réfugiés d'Éthiopie et du Kenya a énormément augmenté entre juin et juillet [ils affluaient au rythme de plus de 3 000 par jour jusqu'à il y a peu, et le principal camp de Dadaab, dans le nord Kenya, accueille aujourd'hui près de 380 000 personnes]. Mais le "contrôle à distance" a ses limites pour évaluer les besoins en Somalie. Nous aurions besoin d'envoyer des personnels médicaux, des épidémiologistes, du personnel international qui nous donnerait une vision indépendante de la situation.

Quelles sont les capacités d'accueil des réfugiés dans les camps du Kenya et d'Éthiopie ?

Les camps kényans étaient déjà saturés en juin, l'aide a mis du temps à se mettreen place. Aujourd'hui, les gens commencent à recevoir régulièrement les rations alimentaires, l'eau, des infrastructures sont en train d'être construites, même si elles sont insuffisantes. Elles ont été conçues pour désengorger les camps, pas pour recevoir de nouveaux arrivants. Par ailleurs, en Éthiopie, le nombre d'arrivées a baissé récemment. A court terme, la forte mobilisation des bailleurs de MSF permettra de répondre aux besoins des réfugiés.

Propos recueillis par Louis Imbert

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